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No59
  13-août-2009  

Nos engagements

UN TEXTE SUR LES CLASSIFICATIONS ET LES COMPETENCES ?


Classification, ou nous en sommes ?

La direction de Coca-cola a mis un terme fin juillet 2009 à la négociation sur la classification et les compétences. Elle a fixé un rendez-vous début septembre aux syndicats qui voudraient cautionner la mise en place de ce texte en le signant.
Au final, l'employeur, qui s'est engagé dans une démarche socialement responsable depuis quelques années, fait fi de l'adhésion des partenaires sociaux, en proposant un texte inabouti à la signature.
La direction de Coca-Cola aurait-elle bien lu l'accord de branche signé en 2005 qui ne prévoit pas explicitement d'avoir un accord spécifique signé sur la classification ?
Nous vous l'avons déjà écrit : "Si un employeur pioche ce qui l'arrange dans un ancien accord de classification de 1993 et ce qui l'arrange dans l'accord de Branche de 2005, en anticipant pour lui certaines dispositions, sans tenir compte de ce que veulent les salariés, il est sûr que le résultat ne reflétera pas les intérêts des derniers." L'employeur peut se satisfaire de son texte mais pour Force Ouvrière, il y a trop de points inacceptables dans ce projet d’ accord.
Nous engageons notre signature sur des accords protecteurs, encadrants et/ou améliorants les conditions pour les salariés de l'entreprise.
Pour Force Ouvrière: L'accord de classification doit :
  • Assurer au salarié un positionnement précis sur une échelle pour déterminer sa rémunération de base lorsqu'il entre dans l'entreprise.
  • Prévoir la manière dont le salarié peut évoluer.
  • Protéger le salarié car l'employeur ne peut plus remettre en cause les niveaux qu'il a précédemment validés.
  • Placer dans une grille tous les emplois dont l'entreprise a besoin en fixant des "valeurs salariales" rémunérant les compétences que les salariés mettent en oeuvre par leur contrat de travail.

    Comment en sommes-nous arrivés là ?

    L’employeur a mis en place des groupes de travail impliquant les salariés sur presque tous les différents postes de l'entreprise, en application de l' « Accord de méthode pour la mise en conformité des classifications chez CCE avec l'accord de branche de 2005 » signé le 21 septembre 2006 par la majorité des syndicats présents dans l'entreprise.
    Mais l’employeur n’a commencé à négocier qu’au mois de mars 2009 avec les syndicats soit 4 ans après la signature de l’accord de branche (16 mars 2005).
    L'employeur a initialement fait le choix d'être seul avec un cabinet extérieur de consultants pour construire cette nouvelle classification (les syndicats viennent juste de recevoir fin juillet 2009 des documents datés de juillet 2008 intégrés au texte).
    Nous ne sommes seulement entrés dans la phase de « négociation » qu’en mars 2009 avec une douzaine de réunions dont la moitié n’étaient que des demi-journées.
    Pour négocier, il faut être deux, la direction et les organisations syndicales. Il ne suffit pas de dire "je vous ai compris", de rester sourd aux propositions des négociateurs et de faire de petites avancées sur des points qui ne sont pas essentiels.
    Les réunions se sont déroulées avec des petits bouts du puzzle distribués au compte-gouttes. Les documents nous ont été transmis uniquement après plusieurs relances. L'employeur a fait à plusieurs reprises des tours de table auprès des syndicats présents pour donner l'illusion de réelles négociations.
    Cela fait seulement deux réunions où nous avons enfin la vision complète du texte du projet d'accord.
    Aujourd'hui, l'employeur voudrait nous mettre le dos au mur en donnant aux organisations syndicales la responsabilité de l'adhésion au texte. Coca-cola a d'ailleurs anticipé en commençant à diffuser sa propre vision de la classification auprès de certaines populations de salariés avec des fiches emplois. Rendant ainsi le salarié impatient de voir dans quel tiroir il allait être casé.


    Un accord toxique pour la construction des accords d'entreprise !

    Un accord est un texte qui engage ses signataires. Or chez Coca-cola, nous avons déjà négocié un certain nombre d'accords qui produisent leurs effets tous les jours (mutuelle, salaires, santé, retraite, congés…). Pour que ces accords fonctionnent, il faut que des syndicats adhèrent en signant ces textes avec l'employeur. Depuis 1990, Force Ouvrière a signé 60 des 63 accords et avenants qui gèrent aujourd'hui le quotidien des salariés.
    Aujourd'hui l'employeur propose un nouvel accord qui modifierait l'application d'un accord en vigueur, notamment en mettant en place "un Complément de polyvalence " qui occulterait l'article 8.10 ("Affectation temporaire de l'accord de 1990"). Un texte signé par certains syndicats ne peut pas annuler un autre texte déjà signé par d’autres syndicats. Tout avantage d’un accord en vigueur ne peut être modifié qu’en respectant les modalités prévues dans le texte et par la volonté des signataires qui ont toujours le pouvoir de signer un nouvel accord.
    De plus, la nouvelle législation sur la validité des accords (loi du 20 août 2008) est déjà suffisamment compliquée pour que Coca-cola ne rajoute pas sa propre touche.
    La construction du droit social chez Coca-Cola Entreprise se fait jour après jour, négociation après négociation, accord après accord, dans la lutte et le compromis. En signant des accords avec certains syndicats, l’employeur ne peut pas se dédouaner de ses engagements antérieurs avec d’autres tant que ces organisations signataires sont toujours vivantes. En mettant en place de telles pratiques l'employeur fragiliserait et opacifierait la force des accords que les syndicats ont négociés loyalement et signés en toute indépendance.
    D'autres points sont encore trop peu précis et subjectifs pour avoir des applications claires et bonnes pour les salariés. Cela engendrerait incontestablement des appels au tribunal des Prud’hommes pour trancher les litiges. Le juge deviendra-il un interlocuteur naturel et incontournable chez Coca-Cola ?

    La grille est-elle cohérente ?

    Concernant la "Classification des emplois par filière", l'employeur prévoit des niveaux différents pour certains emplois ainsi que dans d'autres filières des évolutions de carrières très différentes alors que les gens pour rentrer dans l’entreprise possèdent la même formation initiale ou ont obtenu des diplômes semblables. Si cette grille s’applique telle quelle, nous allons avoir des salariés satisfaits de travailler pour Coca-Cola et d’autres qui vont regretter de ne pas être dans le bon wagon alors qu’ils ont les mêmes aptitudes. Allons-nous laisser des salariés mécontents avec ce sentiment d’être exploité ? Il y a un risque de voir des emplois se vider de leur substance et de leur richesse avec des salariés démotivés.
    Quel serait aussi l’intérêt pour un salarié de changer de profil en développant ses compétences, si ce changement ne lui ramène que plus de responsabilité sans qu’il soit payant ?

    Peut-être que demain l’employeur définira seul ce qu’il n’a pas eu le temps d’écrire ?

    Ce texte renvoie aussi à des discussions ultérieures, notamment la définition de fiche emploi regroupant certains postes existants dans l'industriel et faisant appel à de la poly compétence. Cet accord doit prendre en compte tous les salariés de l'entreprise des ouvriers employés, aux techniciens et agents de maîtrise et les cadres. Sommes-nous des syndicats responsables si à l'application d'un tel texte d’accord des salariés étaient laissés sur le bord de la "grille", leur fiche emploi repère n’étant pas encore définie ? Ces personnes pourraient-elles bénéficier des mêmes droits de recours dans les mêmes conditions que les autres salariés puisque le recours individuels liés à la mise en place de la nouvelle grille n’aurait qu’une durée de six mois?

    Une classification à échelle variable.

    Cette classification devrait permettre aussi d'offrir un certain nombre de repaires en terme de rémunération minimum garantie pour tous les salariés. L'employeur déconnecte et différencie le système d'échelle entre les salariés cadre et le reste de l'entreprise. La classification mise en place au niveau de la convention collective ne prévoit pas de tels aménagements.
    Ainsi les ouvriers employés, techniciens et agents de maîtrise verraient leurs rémunérations calculées en fonction du niveau de coefficient spécifique à Coca-Cola et pour les cadres d'un système se rapportant à la convention collective nationalement reconnue.

    Y a-t-il la reconnaissance immédiate des compétences ?

    Concernant la mise en application éventuelle de ce projet d’accord, l'employeur s'est montré peu coopératif pour nous fournir des données chiffrées afin que nous prenions la mesure des impacts financiers. Par contre, il ne prévoit de ne pas rémunérer immédiatement tous les salariés à hauteur et à l'échelon correspondants au niveau de compétence reconnue lors de l'entretien avec son manager. Ainsi Coca-Cola ferait des économies en exploitant les compétences des salariés.

    Un accord pour demain, cela dépendrait-il seulement des négociateurs ?

    Nous le rappelons, pour Force Ouvrière, il vaut mieux un accord que pas d'accord, mais pour cela il faut un texte correct, nous préférons signer des accords qui sont des compromis acceptables plutôt que de laisser le champ totalement libre à la direction. Si nous avons signé l'ancien premier accord de classification de 1993, c'est qu'il présentait, à l’époque, des avancées significatives pour les employés.
    On a l’impression que l'employeur nous dit :"laisser nous faire, on gère votre carrière et votre évolution en fonction uniquement de nos besoins et des aptitudes que nous avons identifié chez vous ". La direction entend faire ce qu'elle veut de l’avenir des hommes et des femmes avec la signature ou la caution des syndicats.
    Les syndicats ne peuvent que vouloir donner aux salariés la possibilité d'être de réels acteurs de leur parcours professionnel et pas de simples engrenages taillés pour le bon fonctionnement de l'entreprise. C’est bien le sens de l’article 45 de la convention collective (Promotions) qui ouvre à tous les salariés la possibilité de décider par eux-mêmes de postuler à tous les postes ouverts, et pas simplement aux desiderata d’un supérieur hiérarchique.
    L’évolution extrêmement rapide des découvertes et des techniques impliquent une obligation de se former tout au long de la vie professionnelle et pas uniquement de se reposer sur ce que l’on a acquis à l’école dans nos jeunes années. Beaucoup de nouvelles lois, d’accords de branche et même d’accords d’entreprise chez Coca-Cola Entreprise le reconnaissent théoriquement. En pratique, on constate que tous les moyens de formations dans l’entreprise ou grâce à l’entreprise (co-investissement formation, compte épargne temps CET, Droit Individuel à la Formation DIF, CIF…) restent désespérément vus comme des centres de coûts et non comme des opportunités d’investissement dans des compétences qui deviendront indispensables. Le développement de l’entreprise, ce n’est pas uniquement l’évolution de l’Operating Income (OI), c’est aussi le développement du potentiel des salariés présents. Sinon les nouvelles compétences dont Coca-cola va avoir besoin viendraient principalement de nouvelles embauches après éventuellement quelques plans sociaux opportuns pour faire de la place.
    Nous pensons qu'il est possible de mettre en place un système permettant de placer tous les emplois occupés, de faire évoluer et reconnaître le salarié chez Coca-cola Entreprise en évaluant ce dernier sur la base de critères objectifs, en lui donnant la capacité de se former et d’acquérir de nouvelles compétences. Un texte sur les classifications devrait mettre en place des garanties et des garde-fous efficaces pour éviter les dérapages, les mises au placard et stagnations professionnelles que certains connaissent.
    Un accord est un compromis entre les intérêts d'un employeur et les intérêts des salariés. Nous considérons ce qui est amélioré pour chaque catégorie de salarié et il n'y a pas d'avantages consentis par la direction sans des contre parties. Signer un accord qui mécontenterait 75% des salariés (les OE/TAM) et qui n'apporterait rien à 25% des autres (les cadres) ne nous paraît pas sérieux.
    Au-delà du texte sur la grille de classification, il nous parait syndicalement inacceptable d’autoriser un employeur à modifier un accord à l’intérieur d’un autre accord, et de dévaloriser des avantages donnés aux salariés par la convention collective.
    Force Ouvrière est composé d'adhérents qui sont des salariés. Nous agissons pour améliorer le salaire, les autres avantages, les conditions de travail, la santé et la sécurité, les droits à information, qualification, formation, évolution, non-discrimination, dignité de chacun, la collaboration entre les services, l'entraide dans les équipes, et pour un management positif.
    Avec vous, votre soutien et vos votes, nous continuerons ce combat.


      top.gif  Dépôt CCE: 13-août-2009  
      c.gif  Responsable de publication: Cyril HERBIN